Le cimetière de Passy
sous la conduite de Roger Charneau
Mardi 17 juin 2014


  C’est à une nouvelle promenade à la rencontre de quelques célébrités du passé que Roger CHARNEAU nous a entrainés le 17 juin 2014 dans le cimetière de Passy.

  Créé en 1820, pour remplacer un cimetière plus ancien desservant le village de Passy, l’actuelle nécropole, contrairement aux cimetières contemporains, créés hors le murs, était au coeur du village aristocratique de Passy, qui fut rattaché à Paris en 1860.

  Il s’étend sur une superficie de 1,74 ha et abrite 2 500 sépultures. C’est un lieu d’inhumation de personnalités des mondes aristocratique, bourgeois ou fortuné, résidant de leur vivant le plus souvent dans le 16e arrondissement. Le coût de la concession à perpétuité est de 15 000 € pour 2m2, et la concession cinquantenaire est au prix de 5 000 €. La faible superficie du cimetière et le coût des concessions expliquent d’une part l’importante liste d’attente pour y être inhumé et d’autre part, ce que Roger CHARNEAU appelle les "squatters", qui, en vertu d’un lien de parenté quelquefois ténu avec un défunt, peuvent quand même y trouver place.

  Le cimetière fut rénové en 1934/35, époque à laquelle l’architecte René BERGER construisit l’imposant portail et la rotonde du salon d’accueil, décorée de trois bas-reliefs en corniche, dus au sculpteur Louis JANTHIAL, figurant les âges de la vie. C’est à la même époque que fut construit le mur d’enceinte et, place du Trocadéro, le monument, assez délaissé, « à la gloire de l’Armée française, 1914-1918 » dû au sculpteur Paul LANDOWSKI.

  Il n’est pas possible de citer les noms de toutes les personnalités évoquées lors de la promenade, dont pour chacune d’entre elles, Roger CHARNEAU a eu une anecdote de la grande ou de la petite histoire à raconter. Les sépultures sont dans l’ensemble cossues avec un nombre élevé de chapelles monumentales, renfermant des décors (vitraux, peintures et mosaïques) de qualité, reflétant le niveau social des personnes inhumées.

  Dés le début de la promenade, Roger CHARNEAU souligna avec malice la proximité des tombes de l’empereur Bao-Daï, dernier empereur du Viet-Nam, avec celles des généraux Navarre et de Castries, acteurs contreversés de la bataille de Diên-Biên-Phu. On croisera également les tombes d’autres militaires et notamment les généraux Gamelin commandant en chef de l’Armée française pendant la Drôle de Guerre et Nivelle dont l’épitaphe lui attribue la victoire de Verdun ! Quant au général Huntziger, qui reçut dans le wagon de Rethondes les conditions de la capitulation de 1940, et disparut en 1941 dans un accident d’avion, c’est un cénotaphe qu’abrite le cimetière.

  Les mondes des affaires (Marcel Dassault dont la sépulture nécessita le réaménagement d’un rond-point du cimetière, Cognacq-Jay, Francis Bouygues, la famille Seillière, Robert Hersant, Bouchara…) des arts avec des peintres (Edouard Manet qui partage sa sépulture avec Berthe Morisot, épouse de son frère…), des comédiens (Fernandel, Réjane dont le caveau abrite également la dépouille de François Périer, Béatrice Bretty qui fut compagne de Georges Mandel et repose avec l’aviateur Louis Castex, Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud…), des musiciens (Debussy, Fauré, Messager, Loulou Gasté, Yves Nat…), des écrivains (Octave Mirbeau, Maurice Genevoix, Jean Giraudoux, Tristan Bernard, Las Cases, Gérard de Villiers, Virgil Gheorgiu…) des gens du monde des média (Marcel Ichac, Jean Drucker, Michel Droit, Thierry Roland, Henri Smadja…) des hommes politiques (famille Carnot, Alexandre Millerand, Edgar et Lucie Faure, Georges Mandel…) des aviateurs (Farmann, Colonel Rozanoff, Costes et Bellonte…) et des médecins tel le professeur Dubost, pionnier de la transplantation cardiaque.

  On rappela également le souvenir de quelques amazones célèbres telles Nathalie Clifford Barney, Renée Vivien, écrivaine, dont la tombe est devenue lieu de pélerinage pour les lesbiennes, à l’instar de celle d’Oscar Wilde au Père Lachaise pour les homosexuels, ou encore la princesse ukrainienne Marie Bashkirtseff dont la chapelle est sans nul doute la plus imposante du cimetière – avec celle de l’inventeur Marinoni - et dont l’intérieur rappelle le salon de l’artiste…)

  Nous évoquâmes au passage bien d’autres personnalités, célèbres de leur vivant et aujourd’hui bien oubliées malgré les honneurs dont elles étaient couvertes. D’autres plus proches de nous dont les noms évoquent encore des souvenirs à certains d’entre nous, tel Haroun Tazieff, ou encore la tombe richement fleurie de la mère et de la fille de la dernière impératrice d’Iran, Farah Diba.

  La promenade nous permit également d’admirer des oeuvres de Paul Landowski (buste de la cantatrice Rosine Laborde et bas-relief du monument d’Henri Farmann), le médaillon de Jehan de Bouteiller par Rodin et le bas-relief de la sépulture de Paul Guillaume par Zadkine.

  Mais les Ardennais dans tout cela ? Le cimetière de Passy abrite deux sépultures d’Ardennais. Celle de Ghislaine Dommanget, comédienne, qui épousa en 1946, le prince Louis II de Monaco et dont la mère était native de Sedan. Elle est inhumée dans sa robe de mariée. La seconde, que nous n’avons pas vue, est celle d’Edmond Barrachin. Ayant des attaches à Signy-le-Petit, il fut membre de « l’Ardenne à Paris » dans les années 1930 et fut député des Ardennes de 1934 à 1936, avant de poursuivre une longue carrière politique jusqu’à sa mort.

  Avant de nous retrouver autour d’un verre dans une brasserie de la place du Trocadéro, nous n’avons pas manqué d’admirer la Jeanne d’Arc bien éloignée de l’image mièvre et virginale habituelle, qui orne la tombe d’André Laval et qui serait en réalité la belle Liane Degaby, épouse du défunt, célèbre vedette de Music hall de la Belle Epoque.

  Jean-Louis LÉGER.